Dans son numéro de novembre, La Gazette des femmes publie un article de Marie Martel sur la formation policière au Québec en matière de violence conjugale et contrôle coercitif, dont nous proposons ici un résumé.
L’article retrace l’évolution de l’approche policière québécoise face à la violence entre partenaires intimes, désormais comprise à travers le concept de contrôle coercitif. Depuis le rapport Rebâtir la confiance (2020), qui a exposé le manque d’adaptation du système judiciaire aux victimes, les organisations policières ont été invitées à repenser leurs pratiques. Le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale (RMFVVC) a ainsi formé près de 5 000 policières et policiers depuis 2021, créant des outils et ateliers pour sensibiliser l’ensemble de la chaîne judiciaire et correctionnelle. Le but est d’aider les intervenants à reconnaître le contrôle coercitif, un système de domination qui va bien au-delà des gestes violents visibles. Cette transformation répond à une meilleure compréhension de la réalité des victimes. Autrefois perçue comme une simple « chicane familiale », la violence conjugale est aujourd’hui envisagée comme un continuum, ce qui modifie la manière d’interroger victimes et témoins. Les policiers sont encouragés à documenter non seulement l’incident ponctuel, mais aussi l’historique de comportements contrôlants pouvant révéler des risques plus sérieux. Cette documentation nourrit ensuite le travail des procureurs, juges et services correctionnels, assurant une intervention cohérente entre les différents acteurs. Les programmes de formation policière ont également été actualisés. Dans les cégeps, à l’École nationale de police du Québec (ENPQ) et au sein de la Sûreté du Québec (SQ), les futurs policiers sont exposés au concept dès leur formation initiale, à travers cours, simulations et outils interactifs. Des formations spécialisées sur le cycle de la violence ou l’évaluation du risque d’homicide sont maintenant offertes, avec des mises à jour régulières en fonction des avancées législatives et des besoins du terrain. Enfin, l’article souligne l’impact de la diversification du personnel policier. L’arrivée accrue de femmes dans les corps policiers depuis 50 ans contribue à une meilleure compréhension de la réalité des victimes et facilite certaines interventions, notamment en établissant un climat de confiance. Pour les intervenantes citées, les nouvelles générations de policiers, mieux formées et davantage ouvertes à la collaboration interdisciplinaire, représentent un signe encourageant pour l’avenir de la lutte contre la violence conjugale et le contrôle coercitif.
Pour plus d’informations sur le Contrôle coercitif : le point sur la formation policière au Québec, consultez le lien suivant : https://gazettedesfemmes.ca/25678/controle-coercitif-
le-point-sur-la-formation-policiere-au-quebec/
Source : Gazette des femmes Novembre 2025 Image: Gazette des femmes Novembre 2025
Auteure : Marie-Ève Martel
Catherine Moore, membre du Comité des femmes secteur 01f
Pour mieux reconnaître les signes de contrôle coercitif, voici une liste d’indices à surveiller :
Isolement social et émotionnel
Interdire, décourager ou surveiller les relations avec la famille, les amis ou les collègues.
Critiquer ou dévaloriser les proches de la victime pour réduire ses appuis.
Décourager les activités indépendantes (travail, études, loisirs).
Manipulation psychologique
Faire sentir à la victime qu’elle est incapable, coupable ou dépendante.
Minimiser, nier ou inverser la responsabilité de la violence (« c’est ta faute », « tu exagères »).
Alterner affection et hostilité pour créer confusion et dépendance. Surveillance numérique et technologique
Géolocalisation permanente par téléphone, montre intelligente ou applications.
Lire ou pirater les messages, courriels ou réseaux sociaux.
Exiger des mots de passe, vérifier les appareils, imposer un accès complet.
Installer des logiciels espions ou des dispositifs de surveillance.
Suivi intrusif après la rupture (harcèlement post-séparation).
Harcèlement judiciaire
Multiplier les plaintes, requêtes, procédures et demandes au tribunal pour épuiser la victime.
Utiliser le système légal pour maintenir le contrôle (garde d’enfants, finances, plaintes infondées).
Prolonger les litiges pour garder un contact forcé.
Contrôle économique
Confisquer ou surveiller les revenus de la victime.
Empêcher l’accès aux comptes bancaires.
Interdire de travailler ou imposer des restrictions financières sévères.
Exiger des comptes détaillés pour chaque dépense.
Contrôle du quotidien
Réglementer l’emploi du temps, les déplacements, l’apparence ou les habitudes de vie.
Imposer des règles strictes (heures, vêtements, repas, activités).
Interdire la prise de décision personnelle.
Intimidation et climat de peur
Menaces directes ou indirectes (violence physique, garde d’enfants, réputation).
Provoquer volontairement la peur de décevoir, déranger ou « faire exploser »l’autre.
Détruire des objets, faire des crises de colère pour intimider.
Dévalorisation et harcèlement moral
Insultes, humiliations, commentaires dégradants.
Ridiculisation en privé ou en public.
Culpabilisation constante, reproches récurrents.
Emprise affective
Faire croire que « sans lui », la victime n’aura personne.
Isoler l’autre sous prétexte d’amour ou de jalousie (« c’est pour ton bien »).
Gaslighting : remettre en question la santé mentale ou les perceptions de la victime.
Violences post-séparation
Surveillance, menaces, harcèlement, diffamation après la rupture.
Suicide forcé : harcèlement moral ou menaces conduisant la victime à un geste irréparable.
Menaces de divulguer des informations personnelles ou intimes.
Source et Image: Gazette des femmes Novembre 2025 https://gazettedesfemmes.ca/nos-editions/controle-coercitif-les-dignites-enfermees/
Auteur : Sébastien Boulanger